C’est correct de changer. Même qu’on pourrait appeler ça évoluer. Mais parfois, la honte qui nous relie à notre passé est un obstacle à aller de l’avant. Cette honte peut être reliée à des traumas, des deuils, des ruptures, des dépendances, des abus.
Il n’y a pas grand monde qui est véritablement né avec la proverbiale cuillère en or dans la bouche, avec un parcours sans ombre ni blessure. Pourtant, il m’arrive régulièrement en tant qu’autrice et conférencière de constater en parlant du plus sombre de ma vie qu’on me qualifie de courageuse, alors que ce que j’ai vécu n’a rien d’unique. Pas toujours le fun ou facile, mais rien d’exceptionnel ni hors du commun.
Une «tache au dossier»
Souvent, on est à penser qu’une vie humaine, ça se calcule comme un tableau Excel, qu’il y a un panel de juges qui nous attend au bout, à quantifier ce qu’on aura fait de bon ou mauvais. On craint un regard sévère sur «un trou» dans notre CV, on parle à voix basse d’un burn out, d’un changement de carrière, d’un retour aux études, d’un célibat prolongé, d’un divorce, d’une cure de rétablissement, comme si ce n’était pas là que des étapes de vie parcourues par des milliers d’autres gens!
«Je m’appelle Cristina, je suis alcoolique…»
Quand j’ai débuté mon blogue de rétablissement d’alcoolisme en 2020, les premiers échos que j’ai reçus étaient que j’étais donc brave de parler de toutes les fois où, de façon peu élégante je l’admets, je dégueulais mon trop-plein de sauvignon aux coins de rue de toute buvette ouverte tard en soir de semaine, comme de jour.
Comme si d’admettre à voix haute ce que j’avais fait en vérité, ça cimentait davantage la réalité de ces périodes de ma vie. Qu’il y ait eu témoin ou non.
«Mais ton futur employeur?»
Sur toutes les plateformes, on applaudit les personnalités qui font état avec candeur de leur dépendance. Certes, si c’est parfois pour regagner des points après des inconduites recensées, ça a comme résultat d’occulter les zones d’ombre dans lesquelles la dépendance prolifère habituellement.
On a aussi eu des témoignages, livres et conférences venant d’artistes qui ont voulu simplement partager leur chemin en toute transparence. Ainsi, on a des personnalités comme Sylvain Marcel, Éliane Gagnon, Étienne Boulay, France Castel et bien plus, qui ont parlé publiquement de leur cheminement de la toxicomanie à la sobriété et qui ne subissent pas l’opprobre de par leurs dérapes passées, si on me passe l’expression.
Au contraire, leur franchise permet d’ouvrir une bien plus large discussion sur un sujet qui a été longtemps tabou.
Et quand on garde quelque chose tabou, c’est plus difficile de s’en écarter pour s’en sortir. C’est plus difficile demander de l’aide pour quelque chose qu’on garde collectivement comme gênant.
Des stigmates en voie de disparaître
Bien que je ne possède pas de tribune du même calibre, je ne compte plus le nombre de fois où dans un salon du livre, une table ronde d’auteurs, un événement littéraire, on est venu me voir pour me remercier de parler des affres de la dépendance, que ce soit avec mon blogue, mon livre ou mes nouveaux récits.
C’est que c’est une question qui pince encore, dans les perceptions sociales. «Une ex-droguée, une ancienne soûlonne», des étiquettes peut-être difficiles encore à décoller?
S’affranchir de tout-e. Toute.
Quand on entame une démarche de travail sur soi, peu importe l’élément déclencheur, on finit un peu par tous se rencontrer au carrefour de l’imputabilité, et du désir de clarté pour continuer.
Non seulement il devient impératif de se libérer du sentiment de honte de nos actions ou inactions passées, mais cela devient même le moteur pour calculer le chemin parcouru.
Notre honte, elle se transforme en fierté non pas d’une destination atteinte, mais d’un point de départ douloureux qui devient de plus en plus loin. Notre passé devient une source de leçons qui, une fois qu’on les aura acceptées, ne pourront plus être utilisées comme des munitions contre nous. On dit donc adieu aux mesquins «On sait bien, toi, t’étais toujours celle qui… » et autres tentatives pour discréditer le progrès. Et juste ça, ce n’est pas peu de choses.
S’ouvrir pour guérir
S’ouvrir permet de guérir des plaies. Je compare souvent les blessures du passé à une écharde qu’on voudrait cacher avec un linge au lieu d’extirper l’éclat et désinfecter le bobo. Ne pas parler de ce qui nous a fait souffrir, c’est risquer la gangrène et l’amputation, au figuré, on le comprendra!
À tous, je recommanderais de développer l’habitude de l’écriture de journal, pour se tenir au courant au jour à jour de ce qu’on ressent, ce qui revient dans nos tourments. On a tendance à se mentir à soi-même par omission. Par le biais de l’écriture, on se révèle sans s’en rendre compte.
Il y a aussi les communautés en ligne qui se multiplient. Plusieurs, comme Soberlab, le Sober Club et bien d’autres, offrent des activités aux personnes en rétablissement de dépendance et c’est l’occasion de créer de nouveaux liens.
Mes recommandations
Lire une «ancienne soûlonne» aussi aura peut-être comme effet de vous décomplexer de vos fautes passées ou présentes en vous disant que vous n’êtes pas si pire que ça! Je recommande alors mon blogue personnel, qui contient plus de 100 textes sur le sujet, et mon livre S’aimer ben paquetée, disponible en commande en ligne, en librairie format papier et numérique.
Soyez certaines, que peu importe le chemin que vous décidez de marcher pour vous seule, la marche a le don de devenir plus agréable plus on poursuit notre lancée!