Du plaisir! C’est bien tout ce que je veux!
Ce matin, je me suis réveillée avec la voix de Jean-François Breau dans mes oreilles. C’est que je suis en quête de plaisir, depuis que mon psy m’a demandé, il y a quelques jours, de nommer mes hobbys. «Ce que je fais à l’extérieur de mes heures de travail? Euh…. Faire le ménage, le lavage, le marché… Écrire, décorer… et retourner des affaires chez Rona?» – Non non, Mitsou. Je ne vous demande pas les activités pour faire rouler la maisonnée. Non plus ce que vous devez rédiger pour votre site, même si ça provient d’une passion. De plus, je vous annonce que si votre définition de hobby est d’aller à la quincaillerie retourner un rideau de douche trop court, on est dans le trouble.
Attrapant un crayon et une feuille blanche au passage, mon psy s’approche de moi. Lentement, il commence à gribouiller sur sa feuille en m’expliquant une stratégie d’adaptation au stress inspirée d’une étude sur des souris. Bon là, je ne me souviens pas du nom de l’étude, mais pour le bien de notre histoire, je n’irai pas la chercher tout de suite sur le web (un cerveau avec un déficit d’attention, on sait que ça peut s’égarer rapidement) alors je vous résume ça vite… On parle ici de trois cages de souris dans un labo. Dans la première cage se trouve une souris qui a tiré le mauvais billet à la loto. Chaque fois qu’elle entend un bruit distinctif, elle reçoit un petit choc électrique. Elle subit ce traitement à répétition et est dans une telle détresse, n’ayant aucun pouvoir d’action, que l’on peut mesurer son stress au plus haut niveau, soit à 100%.
La deuxième souris est plus chanceuse. Elle entend les mêmes bruits et reçoit les chocs, mais heureusement pour elle, on lui a montré comment sortir par une porte, ce qui lui permet de se réfugier dans une cage adjacente, exempte de chocs électriques. La souris a donc une solution, une «clé», pour fuir cet environnement pour le moins désagréable. C’est pourquoi on mesure son stress à 10% seulement.
La troisième maisonnette est habitée non pas par une, mais deux souris. Elles reçoivent exactement le même traitement choc, mais n’ont pas de porte de sortie comme la souris chanceuse. Elles développent cependant un réflexe bien intéressant. Quand elles entendent le bruit annonçant le choc, elle se mettent à lutter, se rouler l’une sur l’autre, se chamaillant pour créer une distraction et ainsi diminuer le stress et la perception de la douleur à venir. Avec le même nombre de chocs que la première souris, ce duo de souris a un niveau de stress de 40%.
On a ainsi démontré avec cette étude que l’impuissance est le plus grand vecteur de stress. Comme avec la première souris, qui ne peut absolument rien changer à sa situation. On comprend aussi par la même occasion que la meilleure façon de gérer un stress est d’avoir une solution à son problème, ce qui donnera une impression de contrôle sur sa vie. Comme la deuxième souris, qui sait comment fuir le danger en se réfugiant dans la cage adjacente.
Et la troisième affirmation? Que l’alternative pour amoindrir un stress pour lequel on est complètement impuissant est de l’accepter ET de se chamailler pour oublier la douleur. Ce divertissement, cette énergie déployée fait diversion sur le problème. Et cette diversion, elle fonctionnerait, autant pour les souris que les humains, seuls ou en groupe. C’est pourquoi avoir un hobby, que cela soit le kickboxing, le jeu de carte, le cinéma, le gossage de bois, les marches en nature (j’en parle dans mon livre!) ou toute autre activité à laquelle on retourne, est pas mal plus important que l’on pense.
Cette étude d’Henri Laborit nommée L’inhibition de l’action (ça m’est revenu!) qui a par la suite écrit le livre Éloge de la fuite, est bien décrite dans le film Mon oncle d’Amérique. Premier film que mes parents m’ont emmenée voir au cinéma (j’avais 10 ans, j’avais trouvé ça bien plate!). Force est d’admettre qu’elle résonne bien plus chez moi aujourd’hui. L’art de la diversion ne fait pas toujours l’unanimité, mais avouons qu’il n’y a rien de mal à se changer les idées avec une activité qui nous fait oublier les chocs répétés que la vie peut parfois apporter, ou du moins, rendent plus acceptable son impuissance devant eux.
Alors, il est où le plaisir?
Ouin, un hobby… Sais pas trop. J’ai pas ben ben le temps de faire de la poterie… Du plaisir! C’est bien tout ce que je veux! me chuchote JF Breau. I wanna have some fun… Move my body all night long! me susurre Samantha Fox. Je veux bien. Mais seulement après avoir rempli le lave-vaisselle, répondu à mes 108 emails et avoir pris en charge les besoins pressants de mes enfants. Cââââline que je suis rendue responsable! Il me semble que j’avais plus de place pour les activités cool dans les années 90, au temps des roller blades et des pagettes!
Je fais le décompte de mes passions. De ce qui me fait vraiment plaisir. Et on ne parle pas de sexe, ici : ) En première place, jouer, me rouler sur le tapis avec mon chien Marlo. Ça efface tous mes soucis instantanément. Peut-être prendrai-je ma formation de photo, comme je me le promets depuis toujours? Ou devrais-je vraiment m’installer un studio de peinture? Ok, ne riez pas! C’est vrai que j’avais dit ça ici il y a deux ans! Jusqu’à maintenant, j’ai seulement raffiné mon tableau Pinterest de studio d’art, mais ne me suis pas encore sali les mains.
Comme bien des gens, je ne peux inventer le temps que je n’ai pas. Alors, j’ai pensé renouveler l’intention devant certaines actions. Un exemple? Je ne pense pas que faire l’épicerie à la même place à la même heure en parcourant les mêmes allées soit la tâche la plus ludique. Mais se rendre dans un marché extérieur avec une amie rigolotte qui sait où on peut trouver les meilleures mangues et réinventer ensemble notre menu, ça change la donne. Il y a aussi l’activité physique. L’insérer dans mon quotidien peut parfois être une source de torture (physique ou organisationnelle) mais y pensant, j’ai réalisé que depuis la pandémie, j’avais arrêté d’aller au gym en personne et je m’entraîne en ligne, devant mon iPad. Niveau productivité, c’est génial. Mais qu’en est-il du sentiment d’appartenance? de connivence avec des gens qui suent en même temps que soi? On revient aux souris qui se roulent ensemble, là!
En discutant de tout cela avec ma plus grande, Stella, elle m’a amené un point que j’aimerais partager avec vous. C’est le concept du troisième lieu. Selon Ray Oldenburg, dans son livre The Great Good Place, pour ressentir le bien-être et l’équilibre, une personne devrait avoir un logis, lieu où elle se sent en sécurité et peut se reposer. Elle doit aussi avoir un deuxième lieu, qui est cette fois-ci un endroit où elle va travailler. Mais saviez-vous qu’elle doit aussi avoir un troisième lieu? Et non, je ne parle pas ici d’un chalet, qui entre dans la portion « logis ». Ce troisième lieu est un endroit de rassemblement pour nourrir sa vie sociale, comme un café, un bar, un jardin (un parc à chien!) où les discussions sont encouragées. Cet endroit bien personnel à chacun, où l’on peut s’inviter en tout temps pour échanger de façon informelle, procure cette chaleur humaine et ce sentiment d’appartenance si importants pour se ressourcer.
J’entends maintenant le thème de la série Cheers, «Where Everybody Knows Your Name». Ces troisièmes lieux sont en déclin depuis que les gens passent des heures dans le trafic pour retourner dans leur banlieue après le travail, mais depuis la pandémie, ce déclin est encore plus marqué, et accentué par la hausse des prix. Pourtant, ce concept du tiers-lieu que les grecs appelaient l’agora, est nécéssaire.
Évidemment, en Europe, où les gens se déplacent à pied pour faire leurs courses, c’est plus facile de trouver son troisième lieu. Au Québec, avec le froid, la distance, admettons que c’est moins évident. Mais en ce printemps où l’on a tous besoin de dégeler de notre hiver et se libérer de nos réflexes de cloisonnement ancrés depuis la pandémie, il serait bien de se rejoindre quelque part où tous connaissent notre nom, comme le dit la chanson de Cheers. On pourra y avoir Du plaisir! Et même du fun all night long, si l’activité est bonne!
Dans les prochaines semaines, je me promets d’essayer une couple d’activités et de faire une recherche de tiers-lieux. Je vous tiendrai au courant dans ces pages. Et si vous en avez à me suggérer, n’hésitez surtout pas à me les communiquer!
Bon printemps!
Mitsou
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