Il fait aussi bon de revenir à ses sources et partager avec ceux qu’on aime un petit carré de vie, comme on se coupe un carré aux Rice Krispies à même le plat. Les jours où je promène mon chien Marlo sur le Plateau, c’est un bout de carré Saint-Louis qu’elle déguste avec appétit. Il ne faut pas qu’elle trouve un «spot» humide, mouillé par la pluie, car elle le dévore. Ça a l’air qu’il est délicieux et irrésistible, car elle y plonge le nez malgré mes cris de découragement.
Ce parc, dont le nom officiel est square Saint-Louis, a été à la genèse de doux moments à discuter sur le bord de la fontaine, et un terrain fertile pour les auteurs comme Michel Tremblay, qui en a fait un personnage en soi. Plus personnellement, il a accueilli les nouveaux amoureux qu’étaient mes parents, alors que mon père, Alain Gélinas, louait un grand appartement côté sud du parc en 1968 avec son frère Pascal et son ami Pierre Harel. C’est dans ce logement que se réunissaient aussi ses amis comédiens du Grand Cirque ordinaire: Paule Baillargeon, Jocelyn Bérubé, Raymond Cloutier, Suzanne Garceau, Claude Laroche et Guy Thauvette. Cette troupe de théâtre alternatif laissant une large place à l’improvisation a fait naître de grands talents. J’aime m’imaginer cette époque où l’amour était la devise et les idées revendicatrices étaient chargées d’espoir.
Récemment, un événement a remis en lumière un autre fait qui m’était inconnu: la première marche montréalaise de la fierté pour faire valoir les droits LGBTQ a été organisée en 1979 dans ce même parc par John Banks, une des figures marquantes du mouvement pour la fierté au Québec. Ce jeune Montréalais avait connu la star Marlene Dietrich à l’âge de 15 ans lors d’un de ses spectacles à Montréal et était devenu son assistant personnel pendant plusieurs tournées.
John Banks a eu la chance d’assister à la première manifestation LGBTQ à Vancouver en 1964. Quelques années plus tard, alors que le 10e anniversaire des émeutes de Stonewall allait être souligné avec une marche à New York, John Banks a eu l’idée de reproduire cet événement à Montréal. Il racontait dans une entrevue publiée sur la chaine Youtube des Archives gaies que les 52 personnes marchant depuis la rue Duluth jusqu’au parc Lafontaine n’avaient jamais ressenti une telle liberté. John Banks, qui n’a jamais vécu dans le placard comme bien d’autres à cette époque, a offert sa voix pour légitimer et faire respecter les droits des personnes gaies pendant toute sa vie. Ce militant de la première heure est mort au début de l’été 2024 à 80 ans, près de 45 ans jour pour jour après cette première manifestation.
C’est à lui que je penserai quand je foulerai la scène de la série IMMIX de Fierté Montréal sur l’Esplanade du Parc olympique. Je me joindrai à Marjo, Elisapie, Pierre Kwenders, Sarahmée, l’ex-footballeur et chanteur français Ouissem Belgacem, Antoniya, Siibii et Passion Poire, ainsi que Rossomodo et Lennikim, qui ont tous les deux fait leurs versions de ma chanson Dis-moi, dis-moi. Venez avec les amis, les enfants et les grands-parents pour célébrer avec nous, car en plus de s’annoncer inoubliable, le spectacle est aussi gratuit!!!!
Psiiit! Vous vous demandez pourquoi ces festivités de la Fierté se déroulent au mois d’août et non en juin comme dans plusieurs villes à travers le monde? Parce qu’à l’époque où les organisateurs de Fierté Montréal ont demandé les permissions nécessaires à la ville, tous les autres weekends de l’été étaient déjà pris par les autres grands festivals. Au mois d’août par contre, Montréal était libre. C’est donc à vous d’occuper l’espace. Venez vous inspirer, vous remplir les pupilles de couleur, les oreilles de musique avant la fin de l’été pour créer les plus beaux souvenirs de 2024.
Que l’on soit jeune, que l’on soit vieux, que l’on soit un allié ou un initié, la fierté se vit à chaque jour, mais pendant cette période, elle est magnifiée. Comme à une certaine époque où tout était à bâtir, tout le monde dites «amour»! Everybody Say Love!!!!