Je vous en ai glissé un mot à la radio, mon amie Heidi Hollinger a lancé la semaine dernière un livre qui donne envie de sortir sa valise et de prendre le premier vol direction Cuba. Intitulé 300 raisons d’aimer La Havane, le bouquin nous montre le vrai visage de la vieille capitale, vu par une insider puisqu’Heidi y vit près de la moitié de l’année. Je lui ai posé quelques questions sur sa ville d’adoption et lui ai demandé de vous présenter 5 endroits de rêve à visiter absolument dans la capitale cubaine. Prêts pour le décollage?
comment cuba a changé ta vie?
Les Cubains sont tellement gentils, généreux et sincères. Ils m’ont accueillie dans leur pays et grâce à eux je m’y sens chez moi. J’y vais depuis 1989 et je passe maintenant cinq mois par année à La Havane qui, selon moi, est la ville la plus fascinante sur Terre. J’ai la chance de vivre auprès des passionnés, bienveillants, créatifs et brillants habaneros. J’ai le sentiment que là-bas, tout est possible.
Ton pire souvenir?
L’ouragan Irma (septembre 2017) a été une sombre période. Des gens ont perdu la vie, d’autres leur maison et leurs biens. Certains secteurs de la ville étaient complètement inondés et les gens avaient de l’eau jusqu’au cou. Mais je n’ai jamais vu autant de solidarité. Le lendemain de l’ouragan qui a jeté par terre les arbres et les lignes téléphoniques de ma rue, tous les gens du quartier étaient dehors pour enlever les arbres centenaires, les coupant avec leurs machettes. Chaque fois que l’une des immenses branches tombait par terre, les voisins se réjouissaient et certains se passaient une bouteille de rhum. Chacun a mis l’épaule à la roue
Et la bouffe?
Je prédis que La Havane sera la prochaine destination foodie. L’offre culinaire explose en ce moment! Il faut réserver bien d’avance pour avoir une place dans les meilleurs restaurants. La nourriture y est fraîche et originale. Les chefs font des miracles tant pour trouver les produits que pour cuisiner avec des fours sans réglage de température ou pour créer chaque jour des menus avec les produits disponibles. Ce sont les plus débrouillards et inventifs de l’industrie.
5 endroits à découvrir?
Le Salchipizza
Le propriétaire du Salchipizza, Alberto González, a su créer des plats très élaborés dans sa petite boulangerie du centre de la vile. C’est un chef étoilé Michelin qui a travaillé 14 ans en Italie et a appris la cuisine moléculaire à El Bulli en Espagne. De retour chez lui à La Havane, il a ouvert son commerce 150 ans après le jour où le propriétaire de plantation Carlos Manuel de Céspedes a libéré ses esclaves, déclaré l’indépendance de Cuba et par le fait même la guerre à l’Espagne. Une photo de Martin Luther King Jr. se trouve d’ailleurs à l’entrée. Tout ce que crée Alberto est emballant et délicieux. Sans compter que sa cuisine est santé! [Calzada de Infanta n° 562 entre Valle et Zapata]
Niels Reyes
Niels Reyes est mon artiste contemporain cubain préféré. C’est fascinant de le voir travailler et jeter de l’émotion sur ses toiles avec d’épaisses couches de peinture. Ses portraits plus grands que nature traduisent si bien l’ambiance et l’attitude qu’on les ressent au plus profond que soi. Vous les regardez. Ils vous regardent. Et vous finissez par baisser les yeux. Les portraits de Niels Reyes trouvent preneur partout dans le monde chez des collectionneurs de New York, de Berlin et de la Chine. Il y a toujours dans son studio inspirant quelque chose de nouveau dont l’aspect frappant s’atténue dès que la peinture sèche.
Pour prendre rendez-vous pour une visite du studio, contactez Niels à [email protected].
Le Nazdarovie
Ce n’est pas juste parce que j’ai vécu à Moscou pendant 10 ans et que j’ai un penchant pour tout ce qui est russe que j’aime le restaurant Nazdarovie. C’est parce qu’ils ont un grand souci du détail, qu’on y propose une cuisine authentique et qu’on peut y ressentir une certaine nostalgie. L’endroit fait hommage aux Cubains qui ont vécu dans l’Union soviétique et aux expatriés soviétiques qui se sont établis à Cuba alors que les deux pays étaient amis. Grâce aux photos d’étudiants cubains en échange portant des chapeaux de fourrure dans le froid de l’hiver et à une panoplie d’articles soviétiques incluant une matriochka (poupée russe) faite par des articles cubains on est soudain nostalgique de l’époque. La nourriture ici est des plus authentiques. Les chefs provenant de Russie, d’Ukraine et d’anciennes républiques soviétiques reproduisent les plats de leur terre natale qui sont possiblement encore meilleurs puisque cuisinés avec les produits frais de l’île. Le restaurant est situé directement sur la Malecón, la promenade le long de l’eau de La Havane. Sachez que le balcon du 3e étage est le meilleur endroit pour regarder le soleil se coucher sur les côtes de la Floride en sirotant un cocktail cubain à base de vodka Putinka
Regla
Regla est l’un des secrets les mieux gardés de La Havane. Vous pouvez vous y rendre en prenant le lanchita (traversier) au port de Habana Vieja (vieux Havane). Il ne faut que cinq minutes pour arriver de l’autre côté de la baie. C’est une excursion amusante et simple qui ne coûte que quelques sous et vous propose la plus belle vue du port ainsi qu’une une vision totalement différente de la ville. Regla est un village de pêche, un port industriel et un centre de Santería, une religion afro-cubaine. Le rythme de vie est plus lent ici. On voit rarement une voiture et j’aime l’ambiance lorsque je marche entre les maisons de bois. Cela a pour effet d’atténuer automatiquement toute source de stress.
Fusterlandia
José Fuster voulait être entouré d’art alors il a décoré chaque centimètre de sa maison, dans l’humble village de pêche de Jaimanitas, de mosaïques. Il a ensuite demandé à ses voisins s’il pouvait faire de même avec leur maison (gratuitement) et a recouvert tout le quartier de tuiles colorées, transformant cette banlieue havanaise de maisons de bois et de poulaillers en un monde fantastique. Fusterlandia était née.
Fuster est un sculpteur, un peintre et un céramiste qui a inspiré toute la communauté à vivre sa magie. Il l’a impliquée dans ses projets et permis à plusieurs de créer aussi leur propre entreprise. Des kiosques de souvenirs ont entre autres vu le jour depuis que des autobus de touristes débarquent à Fusterlandia. Un endroit peu connu est le Parque del Unicornio (parc de la licorne) qui est situé à quelques blocs du studio de Fuster et des 100 quelques maisons décorées de céramique. C’est un petit parc aride avec trois balançoires et une licorne bleue au centre qui attend que la magie opère. Il voulait mon avis sur la transformation de ce parc pour les familles locales et j’ai décidé qu’avec les profits de mon livre, j’allais l’aider à réaliser ce projet!
Du talent dans la famille
Si Heidi est une photographe hors pair, son fils Luka (aka It’s Luka) a la fibre musicale. Son premier opus Second floor feelings a été enregistré en partie à Montréal et en partie à La Havane. À découvrir sur Spotify en sirotant un petit cocktail cubain.