par Après avoir été ovationné à Cannes, le troisième film de Monia Chokri (La femme de mon frère, Babysitter), sort en salle au Québec aujourd’hui. Pourquoi il faut voir ce petit bijou sur grand écran.
1. Pour la chimie de SophiA et Sylvain
L’une des règles pour qu’une comédie romantique fonctionne, car Simple comme Sylvain est une, même si Monia Chokri se joue des codes de ce genre, c’est qu’il doit y avoir une chimie entre les interprètes du couple. Et c’est indubitablement le cas ici. L’intellectuelle Sophia (Magalie Lépine-Blondeau) et Sylvain, le gars de construction (Pierre-Yves Cardinal), n’ont rien en commun. Mais dès qu’elle fait sa connaissance, alors qu’il lui indique les nombreux travaux à faire dans le chalet qu’elle vient d’acheter avec Xavier (Francis-William Rhéaume), son compagnon ronron des dix dernières années, ça fait boom! Et après une courte valse-hésitation, ils se tombent dans les bras. Débute alors une relation ultra charnelle à laquelle on croit immédiatement, grâce aux deux acteurs, qui livrent des performances sans faille.
2. Pour la drôlerie
Entichés l’un de l’autre, Sophia et Sylvain se livrent à leurs ébats dans la clandestinité, tout en tentant d’apprivoiser le monde de l’autre. Elle lit un livre sur la chasse au Québec, il s’intéresse à la poésie, lui cite du… Michel Sardou. Elle finit par dévoiler à son conjoint qu’elle en aime un autre, dans une scène très émouvante. Les amants peuvent alors s’afficher au grand jour. Dans une scène de souper désopilante, Sophia rencontre son beau-frère rustre et sa femme esthéticienne (Mathieu Baron et Christine Beaulieu) et apprend que «Sylvain, c’est l’intellectuel de la famille», dixit sa mère (Linda Sorgini). Mention d’ailleurs à l’équipe de coiffure et maquillage pour cette séquence! Et lorsqu’elle le présente à son cercle d’amis (qui ne boivent évidemment que des vins nature), on a droit à un festival de malaises, qui viennent cristalliser l’abysse qui les sépare. Le scénario tout en finesse de Monia Chokri est rempli de répliques qui font rire. Elle se moque gentiment tant de la famille intello de Sophia, dont le frère (Guillaume Laurin) explique à tout le monde le concept recherché de sa nouvelle œuvre d’art et ridiculise leur mère (Micheline Lanctôt) parce qu’elle ose aimer Damien Hirst, que de celle, à des années-lumière, de Sylvain.
3. Pour réfléchir
Idée brillante de Chokri: intercaler tout au long du film des scènes de Sophia à son travail, à l’université du troisième âge. Le cours qu’elle donne porte sur… l’amour vu à travers la lorgnette des philosphes. De Platon, pour qui l’amour est lié au désir et au manque, à Spinoza, qui distingue les deux, chaque enseignement évoque les phases de la relation entre les tourtereaux. Comme spectateur, on en vient à s’interroger sur ses amours passées, ou présentes. À la différence cruciale entre chimie et compatibilité. Au miroir qu’est l’autre, et à ce qu’il reflète de nous.
Et tout ça, en étant pleinement diverti, et ébloui par la mise en scène et la direction photo du magicien André Turpin. Chapeau, Monia Chokri!
