C’est extrêmement rare que je ferme un livre le coeur serré et des larmes aux yeux. Ça m’est arrivé hier, lorsque j’ai lu la BD de Marie-Noëlle Hébert, La grosse laide.
Lire La grosse laide, c’est pénétrer dans la jeunesse et l’adolescence de l’autrice, dans ses peines, sa culpabilité, sa solitude, sa douleur, mais aussi dans sa quête d’acceptation de soi. Un livre coup de poing pour ados et adultes de tous âges qui, par ses propos et ses dessins sombres, ouvre la porte sur la haine de son propre corps, les préjugés, les propos haineux de ses proches, ainsi que le long et périlleux cheminement vers l’acceptation.
J’ai eu la chance de discuter de ce livre avec l’autrice et illustratrice, Marie-Noëlle Hébert, une jeune adulte maintenant épanouie et bien dans sa peau.
Qu’est-ce qui t’a donné l’idée de te lancer dans ce projet, un livre si personnel dans lequel tu livres une partie importante de ta vie?
Il fallait que je le fasse! Je n’ai même pas pensé aux impacts, au fait que les lecteurs allaient connaître mon histoire. Le faire a agi un peu comme une thérapie.
Mon désir d’écrire est arrivé soudainement, à la suite d’une phrase que mon père m’a dite: je pense que t’as assez mangé Marie-Noëlle.
Cette phrase-là m’a complètement bouleversée. C’était dans une période de ma vie où je me sentais bien, où j’étais avec mon premier chum et où je faisais du sport. Dans les 2 semaines qui ont suivi cette phrase, je surveillais tout ce que je mangeais et je ne faisais jamais assez de sport. J’ai eu un déclic et je me suis dit: il faut que je mette mon histoire en image et que je comprenne pourquoi une telle phrase m’a à ce point bouleversée, moi qui pensais être solide. J’ai donc écrit, réécrit, dessiné, redessiné et j’ai travaillé jusqu’à me faire éditer.
Je vous parlais récemment, de la guérison par l’art. C’en est un excellent exemple!
Ce projet t’a donc fait grandir?
J’ai beaucoup grandi depuis et je livre un pan important de ma vie. Je ne suis plus cette Marie-Noëlle, mais elle fait partie de moi. L’acceptation de soi et de notre corps est un sujet avec lequel je suis maintenant à l’aise de parler. Ce n’est pas tabou.
D’où vient ton immense talent d’autrice et illustratrice?
J’ai toujours été bonne en dessin et j’ai l’habitude de toujours dessiner. J’ai donc décidé de suivre des cours afin de peaufiner ce talent. Avant, mon corps était une obsession et à la suite dece cours, c’est devenu le dessin.
Est-ce que la publication de La grosse laide, t’a donné le goût d’écrire et d’illustrer d’autres BD?
Peut-être en coécrire oui, mais surtout, en illustrer. J’ai créé cette BD, mais je ne me vois pas en écrire d’autres pour l’instant.
Aurais-tu un message pour les ados qui vont lire ta BD?
Plus jeune, je croyais qu’il n’y avait qu’un standard de beauté. Il faut faire du sport pour être bien dans sa peau, pour être en santé, pas nécessairement pour perdre du poids. Des standards de beauté, est-ce si important? Il faut se sentir bien et c’est correct d’avoir des moments d’incertitude. Il faut essayer d’être plus léger et d’arrêter de se mettre tant de pression sur les épaules.
Et pour les parents qui ont un enfant qui a de la difficulté à accepter son corps?
Je dirais aux parents de faire des activités sportives avec leur enfant par pur plaisir, sans arrière-pensée. Je ne suis pas parent mais je suggère de ne pas faire de commentaires négatifs sur le corps de leur enfant. Je leur suggérerais également de ne pas imposer de standard de vêtements. Si leur enfant veut porter un vêtement serré et qu’il a un surplus de poids, laissez-le s’exprimer! Laissez-les être eux-mêmes!
Merci Marie-Noëlle pour ton courage, ta ténacité et tes propos si francs. Je constate que cette jeune Marie-Noëlle du livre est devenue une magnifique jeune adulte resplendissante et confiante en la vie. C’est beau à voir!