S’il y a quelqu’un qui peut nous faire manger plus de légumes, c’est bien Ricardo!
Ce n’est pas un secret, tout ce que touche Ricardo se transforme en or! Cette fois-ci, le chef réputé s’attaque aux légumes et, détrompez-vous, il ne s’agit pas d’un livre pour végétariens. Ce nouvel ouvrage comprend plus de 120 recettes inédites et appétissantes, dans lequel, pour une rare fois, les légumes sont les vedettes et les protéines (viande, volaille, poisson, etc.) sont les accompagnements! Pour redoubler d’originalité, le chef préféré des Québécois sort des sentiers battus et renonce à organiser ses recettes par thème ou par type de légumes, mais choisit de les classer par niveau de difficulté, des plus simples aux plus élaborées. Des recettes qui se composent de peu d’ingrédients et qui exigent un minimum d’exécution, telle que la salade de concombre au sésame ou le satay de chou-fleur, aux plats plus raffinés parfaits pour recevoir comme le spanakopita à partager, on y trouve des idées de repas accessibles et adaptés à chaque occasion.
Dans Plus de Légumes, Ricardo nous séduit une fois de plus avec un recueil magnifiquement illustré rassemblant des plats hauts en couleur, en texture et en originalité qui raviront, à coup sûr, toutes les papilles (autant celles des carnivores que des végétariens) réunies autour de la table. Recette après recette, on a envie de manger encore PLUS de légumes!
Ricardo, ton nouveau livre est consacré aux légumes, qui sont un peu les «malaimés des aliments»! Est-ce que tu t’es donné comme but de nous les faire aimer?
En fait, ils sont désirés, c’est juste qu’on manque d’imagination de temps en temps pour les cuisiner! Dans toutes les questions que je me fais poser tous les jours, c’est ce qui revient le PLUS: d’avoir d’autres variétés de protéines que de la viande et surtout, savoir avec quoi on peut les mélanger pour que ça soit bon! Si tu arrives un soir chez toi et que tu te demandes ce que tu veux pour souper, généralement tu vas avoir une bonne idée si tu veux manger du poisson ou de la viande, mais tu te demandes souvent ce que tu vas servir en accompagnement. Souvent, c’est là où on l’on se questionne le plus et où la panique commence à s’installer, puis on finit très souvent par revenir à nos 4-5 recettes incontournables qui deviennent un peu répétitives avec le temps. Avec mon nouveau livre, finie la routine! Lorsqu’on le feuillette, on s’aperçoit qu’il y a des recettes très multiculturelles, on y retrouve tout ce qu’on aime manger au resto, mais dans le confort de son chez-soi: du thaï, du viet, du grec, de l’italien… C’est vraiment ça qu’on aime manger de façon générale! Alors les légumes que j’ai apprêtés sont beaucoup autour de ces tendances-là. Des tendances qu’on va avoir le goût de manger à l’extérieur, mais qu’on pourra maintenant manger chez nous. Pourquoi on s’en priverait? Plusieurs de ces recettes sont faciles à faire alors il n’y a plus de raisons de dépenser une fortune pour avoir un plat qui goûte comme le resto!

D’ailleurs, je ne voulais pas un livre où il y a des catégories d’entrées, de plats principaux et tout ça. J’avais plutôt envie que l’on se base sur le même principe que les recettes qu’on choisit dans le magazine, lorsqu’on se fait d’abord des moodboards pour planifier ce qu’on veut mettre en ligne, ce qu’on veut faire à manger… Je regarde souvent ces photos-là, ça m’inspire et je trouve que ça a l’air bon! Je me suis dit: «Pourquoi on ne regrouperait pas ce nouveau livre un peu comme s’il était un beau moodboard, c’est-à-dire que tu tournes les pages et ce sont les couleurs, les textures, les saveurs qui vont t’attirer, plus qu’en les identifiant dans des catégories comme entrées ou plats»?! Les entrées et les plats principaux sont donc mélangés un peu partout dans le livre et j’ai préféré les classer par niveau de difficulté: de 3-4 ingrédients à 6 minutes à je reçois mes amis et ma famille et j’ai le goût d’élaborer davantage! C’est le plan de base de ce livre-là, de se dire que peu importe où tu tombes dans le livre, tu sais que si t’es au milieu, tu as plus ou moins d’étapes, mais si tu arrives à la fin, il y a plus d’étapes mais ça va être impressionnant et au début, je voulais juste une salade, un légume rôti, peu importe, ça va être simple!
Tu nous confies justement au début du livre que les légumes évoquent chez toi plusieurs souvenirs en famille. À la base, c’était ta grand-mère, ta mère, et puis finalement, ce sont devenus tes propres souvenirs à toi.
Ma grand-mère, ma mère… oui, c’est pas mal ça. Écoute, ma mère, elle est morte chez moi… et jusqu’à la fin, elle était dans le jardin! J’ai des photos d’elle où elle a le soluté, elle est au bout du rouleau, elle va mourir bientôt, mais elle est quand même dehors dans le potager en train de regarder et de travailler dessus. Je la vois encore prendre le thé sur la petite table à café qu’on a sur le bord du jardin. Je l’ai prise en photo avec ma petite Jeanne (qui est rendue grande, qui a maintenant 15 ans et qui mesure 5 pieds 9) mais elle est posée avec sa grand-mère et ils ont des légumes du jardin et un petit bol de framboises dans les mains: je me dis que c’est quand même extraordinaire parce que ce jardin-là, d’après moi, l’a gardée en vie même plus longtemps parce qu’il l’a tenue occupée jusqu’à la toute fin. Et moi, ça m’a procuré encore plus de beaux souvenirs, ça a prolongé ces souvenirs-là…
On avait un petit lopin de terre chez nous, on habitait dans un bungalow à Beloeil, on n’était pas sur une ferme et on n’avait pas un grand jardin. On avait ce que 90% du monde peut avoir au Québec: un petit bout de terre où tu as décidé de planter des carottes, du concombre, de la salade, trois-quatre plants de framboises… C’est parti de là! Quand ma mère est partie, effectivement, c’est dans le jardin que j’ai le plus pleuré, à genoux, les mains dans la terre. J’étais heureux en même temps parce que j’avais l’impression de la retrouver. J’avais l’impression d’être avec elle encore parce que c’est là où je l’ai vue beaucoup. Parfois, tu te demandes ce que tes parents t’ont transmis, ils peuvent te transmettre un paquet d’affaires, mais souvent, tu ne le sais pas trop sur le coup. Des fois, je parle à des jeunes en centres jeunesse qui sont là pour toutes sortes de raisons et qui vont manger à la cafétéria trois fois par jour jusqu’à ce qu’ils aient 18 ans. Ils se retrouvent alors seuls à 18 ans, ils ne savent pas se faire cuire des pâtes… Moi je dis que la plupart des jeunes savent faire cuire des pâtes, parce que tu as vu ton père ou ta mère le faire même s’ils ne te l’ont jamais enseigné. Tu les as vus brasser ça, mettre un peu de sel dans l’eau et that’s it… tu peux te faire un Kraft Dinner sans problème! On apprend beaucoup par mimétisme, donc on copie des choses qu’on a vues, mais qu’on n’a pas nécessairement réalisé qu’on apprenait. Moi, j’ai reproduit ce que ma grand-mère et ma mère faisaient dans leur jardin, comment elles s’en occupaient et nous nourrissaient.

Même si on parle de légumes, ton nouveau livre de recettes n’est pas un livre végétarien et c’est bien clair pour toi!
Les légumes, c’est souvent là où l’on veut aller le plus de nos jours, c’est ce que les gens me demandent le plus! Ils ne veulent pas être végétariens, mais ils veulent avoir des variétés! On a le goût d’être en santé, on a le goût de manger local, alors il y a beaucoup beaucoup de ces recettes-là avec des légumes qui poussent tous ici! Ça, ça fait plaisir! Et je voulais un livre qui allait faire plaisir autant aux végétariens qu’aux carnivores. Si je te parle de mon couscous aux chou-fleurs, j’ai ajouté des merguez dessus, parce que je voulais faire un vrai clin d’oeil au couscous! Mais il n’y a même pas de couscous dedans (c’est le couscous qui est haché finement) alors c’est sans gluten… Si tu veux vraiment être végétarienne, eh bien tu peux te mettre une autre protéine que de la viande et ça va être complet. Mais l’inverse est vrai aussi! Si je fais une recette qui est complètement végétarienne, mais que tu as envie de t’ajouter un morceau de poisson ou une poitrine de poulet grillée, ben go for it! On n’est pas dans le jugement. On est là parce que souvent dans une famille maintenant, on est deux ou trois à avoir des envies culinaires différentes, pour des raisons de santé ou simplement pour des goûts personnels. À un moment donné, ma plus vieille nous avait annoncé qu’elle voulait être végétarienne; elle ne l’est plus aujourd’hui, mais pendant trois ans, elle avait des envies qui étaient beaucoup plus centrées sur les légumes et autres. Donc, moi, ça m’a forcé à voir à ce que ce soit quand même équilibré, parce que je devais veiller à ce qu’elle ait son fer, son calcium, que les protéines soient complètes, en plus de ses activités physiques! Il y a une réflexion derrière ça! J’ai fait la même chose dans ce livre-là. Quelqu’un qui a envie de manger des beaux et bons plats végés complets, ils sont là! Mais si t’aimes la viande et que tu veux du boeuf, c’est là aussi! La viande ou la protéine animale est maintenant un accompagnement des légumes! C’est comme ça que je le vois, parce que c’est ce que le Québec a envie d’avoir.

Ce n’est pas toujours facile de faire aimer les légumes aux enfants. Il faut user d’imagination pour qu’ils terminent leur assiette!
C’est vrai, mais parfois on vit dans des mythes que NOUS, les parents, on traîne avec l’âge. Par exemple, le plus grand mythe, c’est que les enfants n’aiment pas le brocoli. C’est tout à fait faux! C’est le légume #1 des enfants. Qui part ça, cette mode-là que les enfants n’aiment pas le brocoli? Ce sont des parents qui n’ont pas aimé ça! C’est pour ça que jamais à la télévision ou dans mes magazines, nulle part, je vais préciser mes goûts personnels. Parce que ça n’a aucune importance. Je peux dire mes préférences, mais pas que je n’aime pas quelque chose… Pourquoi j’influencerais négativement quelqu’un? Le commentaire le plus épais et célèbre comme ça, c’était Bush qui avait dit qu’il n’aimait pas le brocoli. Par la suite, les ventes de brocoli avaient diminué bien évidemment… il vaut mieux influencer les gens de manière positive, toujours. Tout est bon! Il n’y a pas d’aliments pas bons. Tout est dans la façon de les préparer, dans la quantité, le moment… Moi, les choux de Bruxelles, c’est triste parce que j’ai passé une grande partie de ma vie à dire que je n’aimais pas ça, alors que j’en suis fou maintenant! Je n’aime pas les choux de Bruxelles bouillis, je n’aimais pas ça… je n’aimais pas le goût, la texture, ni l’odeur. Je n’aime toujours pas ça, comme je n’aime toujours pas les petits pois en canne! Mais je suis fou des petits pois surgelés! Sautés au beurre, dans un risotto ou une petite pâte… je peux te donner plein de recettes de petits pois! Ce n’est pas vrai que je n’aime pas ça, mais j’ai répété ça quand j’étais petit. Je n’aimais pas ce que ma mère m’a servi comme petits pois. Ça, c’est une grande différence. J’adore les choux de Bruxelles de la manière que je les apprête aujourd’hui, effeuillés, avec un peu d’huile d’olive, grillés au four… c’est super! Il faut trouver des façons le fun d’aimer nos aliments… que ce soit les pommes de terre en patates pilées ou en frites par exemple. Et après ça… Est-ce qu’on est obligés d’aimer TOUS les légumes? Non. Sur la quantité de légumes que j’ai mis dans le livre, je me dis que ça ne se peut pas qu’il y en ait plusieurs qui ne plaisent pas par leur texture, par leur couleur, par leur saveur, par les épices qu’on a mises dessus, la sauce qu’on a ajoutée… Mais en même temps, c’est bien des recettes avec des légumes, mais ce n’est pas une religion, il faut que ça reste le fun! Il ne faut pas que ce soit un combat! Quand tu arrives à la maison après une grosse journée de travail ou d’école, tu n’as pas le goût d’avoir un autre combat. Intelligemment, on va choisir des recettes à table qui plaisent à tout le monde et le cours d’éducation, on se le fera à un autre moment donné quand on va avoir l’esprit à ça.

Hier encore j’étais dans une salle et il y avait 1000 personnes et certains viennent me voir après et la première chose qu’ils me disent, c’est qu’ils ne sont pas bons en cuisine. Là, vous allez m’arrêter ça tout de suite, que vous n’êtes pas bons! Parce que moi, je n’y crois pas. Vous êtes excellents, mais vous n’avez jamais eu l’énergie et le temps de le faire. Ça, ce n’est pas pareil. Je veux dire… que c’est ça, la réalité. T’as couru comme une folle ou un fou, t’es arrivé chez vous, t’es brûlé; c’est ça la réalité de la plupart du monde. Ma job, c’est de me donner 20 minutes pour que j’essaie de réfléchir à trouver une idée qui t’intéresse, je vais essayer aussi de réfléchir au portefeuille, réfléchir à ta santé… Ma job, ce n’est même pas de te dire que tu devrais manger du chou-fleur. Tu es assez intelligent pour le savoir! Pas besoin de te dire ce que tu veux manger pour souper. Je haïs le monde qui me dise ce que je devrais manger pour être plus gros, plus petit, plus en santé, moins irrité, moins de ça… Je ne suis pas un tata. Si j’ai le goût de manger du chou-fleur, dis-moi comment le manger qu’il soit bon, que ça ne coûte pas cher et que je sois satisfait du résultat; ça, c’est ma job! Alors ce livre-là, je crois qu’il répond à ça dans les légumes.

Quelle recette justement conseillerais-tu aux mères de famille pour les soirs de semaine pour leurs enfants?
Je pense qu’un jeune, ça aime ça choisir… surtout les nouvelles générations. Se faire imposer des affaires, ils ne sont pas forts là-dessus (rires)! En même temps, quand tu demandes à ton jeune ce qu’il veut manger, généralement tu n’as pas de réponse vraiment. Ils ne savent pas trop! Écoute… On est adultes et Brigitte me demande parfois ce que je veux manger cette semaine. Je ne sais pas moi-même. Alors comment veux-tu le planifier? C’est pour ça que les jeunes planifient vraiment dernière minute… Je pense à mes petits chou-fleurs en satay, ils sont super! Chacun prend sa feuille de laitue, tu mets tes ingrédients, et si tu sais qu’un de tes jeunes ne tripent pas tellement chou-fleur, rajoute des petits cubes de poulet ou quelque chose qu’il aime… mets la recette à ta main! Cette recette-là, un coup que tu as décidé de la faire, ce n’est plus à moi… c’est à toi! Parfois, tu es insécure, tu veux rien changer la première fois, et tu remarques que ce sont tes enfants qui vont dire «Maman! Ça aurait été bon si on avait mis ça avec ça…» Prends des notes, écris-le dans le livre, et la fois suivante, on le rajoute! C’est le fun, parce que le jeune se sent valorisé parce que tu as écouté son idée. Sinon, quelqu’un qui aime les affaires molles, fais-lui mes aubergines au four, avec de la sauce tomate et tout ça… et si tu aimes le spaghetti, opte pour la bolognaise végé!
En plus de ton livre su les légumes, tu as aussi sorti le livre pour les enfants Explique-moi… les aliments. Est-ce que tu peux m’en parler un peu?
On a pris 75 questions qui reviennent le plus fréquemment sur l’alimentation et le corps humain, que les jeunes nous posent. Pourquoi faut-il boire de l’eau? C’est quoi ça, du gluten? Quel est l’effet des légumes sur le corps? Les carottes, ça va-tu être mieux pour les yeux? Pourquoi des vitamines? Je suis obligé d’en manger? Ça fait quoi le vinaigre sur tel aliment? On a testé le tout et même moi, même si ça fait 10 fois que j’en parle dans mes chroniques, je ne sais pas tout par coeur… Si on était capables de retenir toutes les maudites bonnes recherches qu’un recherchiste nous a données, on serait des génies (rires)! Mais bon, on n’est pas infaillibles! On les lit, on trouve ça brillant et trois mois après, ça nous sort de la tête… et c’est à ce moment qu’un jeune te pose une question, pas si compliquée pourtant, que tu as sur le bout de la langue, mais que tu as oublié momentanément! C’est pourquoi on a créé ce livre-là, qui s’adresse aux enfants âgés de 8 ans et plus et qui offre des réponses sur le vaste monde de l’alimentation. Quand tu le lis avec ton enfant, tu as un peu un sentiment feel good qui fait que, comme parent, tu te sens plus «intelligent», tu es capable de lui donner une réponse. Je l’ai d’ailleurs fait en cahier spirale pour qu’un prof à l’école puisse le prendre ou que tu puisses avoir du fun dans l’auto si tu veux! J’ai mis des petits autocollants aussi à la fin pour que les jeunes puissent les coller! Je l’ai fait vérifier par la nutritionniste Virginie Meloche-Dumas, qui travaille auprès des enfants au CHU Sainte-Justine, et c’est coécrit par la journaliste Jade Bérubé. Je trouve ça le fun quand je peux donner l’occasion aux parents de se sentir bright! Parce que moi, le premier, ça me fait du bien quand je peux répondre à une question. Je suis le premier à m’acheter des livres sur 50 religions en 10 minutes ou connaître la météo en tant de minutes… il y a des séries de livres comme ça et ça m’a beaucoup aidé, moi, avec les enfants pour avoir l’air un peu plus intelligent. Je pense qu’il n’y a pas un parent qui ne va pas aimer ce livre-là autant que son jeune, parce que vraiment… c’est la base. Et quand on leur explique la base, on les rend non seulement plus curieux, mais plus sceptiques de tout. Et ça, j’aime ça!
Plus de Légumes, qui paraît chez les Éditions La Presse, est disponible dès maintenant sur le web (39,95$) et en librairie.
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Recettes: David De Stefano