Le matin du 20 octobre 2022 ressemblait à tous les autres matins. Je me suis préparée pour aller travailler puis, en avant-midi, j’ai ressenti un léger mal de tête, comme il nous arrive à tous d’en avoir. Je me souviens d’avoir pris un ibuprofène, et d’avoir par la suite commencé à avoir des nausées. Une collègue m’a aidée à me rendre aux toilettes. Par précaution, parce que mon état l’inquiétait, elle a pris la décision d’appeler l’ambulance. J’ai alors eu un moment d’absence.
Que s’est-il passé durant cette absence? On me l’a appris à mon réveil. On m’avait installée dans la salle de repos au travail pour attendre l’ambulance. Durant le trajet, semble-t-il que j’ai parlé avec les ambulanciers près de 30 minutes avant notre arrivée à l’hôpital Notre-Dame. Pendant l’attente, j’ai même texté des proches pour les informer que j’attendais de voir un médecin. Je n’en garde aucun souvenir.
Opérée d’urgence
Je me suis réveillée du coma trois jours plus tard au CHUM, où l’on m’a expliqué que j’avais été opérée d’urgence des suites d’une rupture de deux anévrismes au cerveau. L’opération consistait à retirer le liquide céphalorachidien et le sang que j’avais au cerveau à l’aide d’un drain ou, de son petit nom médical, un DVE, et à sécuriser mes deux anévrismes avec des clips.
N’ayant pas ressenti de symptômes annonciateurs outre mon mal de tête, mon neurochirurgien, le Dr Michel Bojanowski, n’a pas été en mesure de déterminer la source de ces anévrismes.
En faisant des recherches, j’ai compris que la situation aurait pu être grave en voyant les mots anévrismes et AVC associés. Un anévrisme, c’est un renflement de la paroi d’une artère et, quand il atteint une grande taille, cela peut causer une rupture d’anévrisme et entraîner des saignements. Dans certains cas, ça peut être là de naissance ou s’être développé sur une certaine période de temps.
Je me souviens que l’on venait souvent vérifier mes signes vitaux et mes réflexes afin de mesurer le fonctionnement de mon cerveau à la suite de l’intervention. Une de mes infirmières me disait toujours: «Héléna, si tu veux guérir, tu dois aller t’asseoir dans la chaise.» Elle parlait de la chaise dans ma chambre, où je devais passer du temps pour éviter de perdre ma motricité et un risque de paralysie. Je pouvais y rester pendant trois ou quatre heures consécutives avant de retourner dans mon lit.
Le seul problème, c’est que je redoutais ce moment de retrouver le lit, car les manipulations du personnel pour m’y réinstaller, et celui-ci faisait son travail adéquatement, je tiens à le préciser, me causaient des douleurs au dos d’environ huit sur une échelle de dix. Très vite, pour réduire le mal, j’ai décidé d’essayer de me remonter dans mon lit toute seule en demandant aux infirmières où m’asseoir pour être à la bonne hauteur par rapport à l’oreiller. Car je devais être dans une certaine position pour que le drainage s’effectue comme il faut. J’utilisais les rampes du lit pour m’installer et me retourner dans le lit, ce qui réduisait de beaucoup les douleurs puisque c’est moi qui contrôlais mes mouvements.
Remonter la pente
Entre les messages de mes neveux que mon frère me faisait parvenir, les mots d’encouragement de mes amis et les visites de mes proches, j’ai constaté toutes les petites victoires que je remportais durant mon rétablissement, mais je revenais de loin.
Quand ils ont retiré le drain, deux semaines après le début de mon hospitalisation, la première chose que j’ai demandée à mes infirmières, c’était si je pouvais faire le tour de l’étage pour varier un peu mes périodes hors du lit et entretenir ma motricité. Les autres infirmières des soins intensifs s’étonnaient de me voir me déplacer sans marchette ni escorte médicale, car les patients qui le font dans cette section de l’hôpital sont plutôt rares.
Après avoir rencontré ma physiothérapeute et une ergothérapeute, les médecins m’ont indiqué ma date de sortie : le 11 novembre 2022. Enfin! Ça faisait plus de trois semaines que j’étais hospitalisée. Avant de quitter, ils m’ont dit de prendre des Tylenol pour mes maux de tête et de bien m’hydrater. Mon frère et ma marraine m’ont accueillie les deux premières semaines de ma convalescence pour éviter que je me retrouve seule à la maison. Les transports en voiture m’incommodaient les premiers jours, alors je trainais des Tylenol et de l’eau lors de tous mes déplacements. Au début, quand j’éternuais, j’avais le sentiment que mon cerveau bougeait dans ma tête, comme si mon crâne devait encore se ressouder pour le tenir bien en place. La sensation n’est pas très agréable, mais comme beaucoup de choses quand on subit une intervention, on doit faire preuve de patience et attendre que les choses s’améliorent.
Mon infirmière en neurologie a effectué des suivis pour s’assurer que tout allait bien et s’est montrée disponible pour répondre à toutes mes questions. J’ai suivi ses conseils à la lettre et j’ai appris à écouter ce que mon corps me disait, surtout quand il me demandait de me reposer pour récupérer.
Après 15 semaines de convalescence, j’ai effectué un retour progressif au travail à la mi-février 2023 et, un mois plus tard, je reprenais à temps plein. J’ai aussi recommencé tranquillement le vélo, sauf par journées de grandes chaleurs afin d’éviter les risques pour ma santé. En juin 2023, j’ai enfin pu assister à ma remise de diplôme d’adjointe de direction, décalée à cause de la pandémie.
Un an plus tard
Avec le temps, les choses se sont replacées, mais j’ai gardé l’habitude d’avoir toujours ma bouteille d’eau à ma disposition et il m’arrive de ressentir un peu de fatigue. J’ai commencé à prendre des médicaments pour un début d’hypertension, j’ai repris le cours de ma vie et j’évite les sources de stress autant que possible. Selon mon neurochirurgien, lors de notre entretien en juillet dernier, les résultats des tests que j’ai passés sont beaux et je serais revenue à 99 % comme avant, ce qui est une excellente nouvelle! Il veut me revoir dans deux ans pour un suivi. Je lui ai fait part de mes observations et il m’a dit que tout est normal et que ça demande du temps avant de redevenir tout à fait soi-même.
Je suis consciente que j’ai eu beaucoup de chances, car j’aurais pu perdre la mémoire, l’usage de la parole, rester paralysée ou mourir. Ce jour-là, je devais avoir un ange gardien qui veillait sur moi pour m’en tirer sans séquelles.
Pour ceux qui se demanderaient comme moi où est passé le 1 % manquant, eh bien il réside dans ma cicatrice et l’intervention qu’ils ont pratiquée dans ma tête pour me sauver la vie. Mes cheveux ont repoussé et on ne la voit presque plus. Je tiens d’ailleurs à remercier l’équipe en neuro du CHUM pour cette renaissance, car c’en est bien une.
Ce que je retiens après avoir frôlé la mort, c’est que la vie ne tient bel et bien qu’à un fil et qu’il faut en profiter au maximum pendant que notre santé nous le permet!