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Le temps des grands-mamans

C’est rare que je dis ça, mais ma mère m’énervait. Nous étions dans la cuisine un dimanche matin et elle essayait de comprendre mon horaire de la journée.

– Dis-moi… Là tu t’en vas chez Abeille?

– Non, maman. Je te l’ai dit tantôt. Je vais chez mon ancienne voisine Orly qui a eu un bébé. APRÈS, j’irai chez Abeille, mais il faut que je m’entraine avant.

– Mais tu reviens quand?

– Juste à temps pour me changer pour le souper au resto avant d’aller voir le show de Marianna Mazza.

– Ahhh bon…

Pauvre grand-maman et maman d’amour! Elle a de la misère à suivre mon rythme. C’est normal. Elle trouve que je roule à toute vitesse, même les week-ends. De mon côté, je suis habituée. Je suis drillée, comme elle dit, à vivre dans l’exécution. C’est vrai qu’aujourd’hui, j’en ai mis plein mon assiette. Il FAUT que je rende visite à mon amie avant que son nouveau-né ne fasse ses dents. J’ai plein d’affaires à discuter avec Abeille et son mari Na’eem, et le show de Marianna, je veux vraiment le voir. On s’est organisé une vraie sortie de couple avec Seb et sa blonde, ce que l’on ne prend jamais le temps de faire. Mais cet avant-midi, je dois m’entrainer ou entamer un bout de ma nouvelle formation de méditation, question de me garder saine d’esprit…

Résultat?

Je me suis prise dans le trafic de l’échangeur Turcot pendant plus d’une heure. Je suis arrivée super en retard chez mon amie, j’ai dû canceller Abeille et je suis revenue à temps pour me changer, mais mon chum, qui avait juste une dernière petite commission au centre-ville, a fait décaler notre rendez-vous au resto. Arrivés, on a pris des entrées, car on ne voulait vraiment pas être ceux qui arrivent dans la salle de spectacle d’un humoriste après le début de la représentation et qui se font varloper par l’artiste devant tout le monde avant de pouvoir gagner leurs sièges.

Ma mère avait raison. À vouloir tout faire, on ne fait rien. Cette journée-là, c’est moi qui ai angoissé et c’est elle qui a pris plaisir à vivre le moment présent avec mes filles. Elle a entre autres appris à ma plus jeune comment verrouiller la porte d’entrée à double tour. Elle lui a aussi montré la différence entre un robinet et le lavabo (Mila pensait que l’ensemble de la chose était un lavabo, incluant le robinet) puis elle a joué à un jeu de société avec les filles.

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Cet après-midi, je suis allée chez mon amie qui était contente de me voir, mais qui avait l’air paniquée quand je suis arrivée chez elle.

Je suis débordée Mitsou. Pas juste par mon nouveau bébé tout neuf, mais aussi par tout ce que je veux faire pendant mon congé de maternité. Et il y a mon téléphone intelligent qui me stresse. En ce moment, j’ai 17 messages texte en attente de réponse.

Ah! La belle société de divertissement que l’on nous avait promis… J’ai plutôt l’impression d’être dans la scène des Temps modernes de Charlie Chaplin!

Le temps des grands-mamans

Le temps, est-ce qu’on le dévalorise? On n’en a pas la même perception quand on a 20 ans, 30 ans ou 50 ans. Encore plus aujourd’hui, avec la pression du travail, des horaires chargés de tous bords tous côtés et grâce à la technologie qui nous suit partout. Quand on est jeune, on est moins perméable aux conséquences des actions que l’on entreprend à grande échelle ou à grand volume, alors on pousse. Mais les grand-mamans savent bien que le temps n’est pas élastique.

On dit que quand on vieillit, les sphères de notre cerveau deviennent perméables les unes avec les autres et l’on devient plus sensible au stress. Que cela force à ralentir et à faire une chose à la fois. Ce sera sûrement bien difficile pour notre génération de se faire remettre les pendules à l’heure et d’accepter notre vulnérabilité. Nous aurons défié le temps toute une vie, mais l’horloge biologique nous rattrapera. Parfois, j’ai l’impression que c’est déjà fait, dans mon cas.

Nous sommes tous des grand-mamans, des grands-papas en devenir. Un jour, je serai aussi dans la même position que ma maman et je vais voir ce qu’elle voyait: ma course folle, mon étourdissement, ma volonté de me dépasser et de me mesurer, mais à quoi et à qui? Je n’attendrai pas ce moment pour lui dire qu’elle avait raison. Que la vie n’est pas meilleure vécue en accéléré.

Cet après-midi-là, mon amie Orly et moi nous nous sommes assises sur le divan et avons pris un moment pour stopper la machine. Comme au temps des grands-mamans, nous avons pris le thé tout l’après-midi. Le reste allait attendre.

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